Santé - Ozempic : l’antidiabétique continue d’être détourné pour maigrir
L’Ozempic est commercialisé par le laboratoire danois Novo Nordisk. Photo Sipa/Jason Bergman
L’ANSM a émis cette semaine une nouvelle alerte concernant ce médicament, normalement réservé aux diabétiques de type 2 mais parfois utiliser pour perdre des kilos. L’autorité sanitaire redoute des « tensions d’approvisionnement », qui pourraient priver les malades d’un « traitement essentiel ».
Commercialisé depuis 2019 en France, l’Ozempic fait fureur dans l’Hexagone et ailleurs dans le monde. Mais pas toujours pour les bonnes raisons. À l’origine, ce médicament, qui prend la forme d’un stylo injectable, est destiné aux diabétiques de type 2, en trithérapie. Or depuis plusieurs mois déjà , son usage est détourné par des personnes souhaitant tout simplement perdre du poids. Ce qui inquiète les autorités sanitaires.
Le principe actif de l’Ozempic, le sémaglutide, a un effet antidiabétique puissant. Mais cette molécule permet aussi de réduire le poids de façon significative. Une propriété qui n’a pas échappé à certaines célébrités. Depuis plusieurs mois, des stars comme Elon Musk vantent ses mérites sur les réseaux sociaux. Sur TikTok, on ne compte plus le nombre de publications faisant référence à ce traitement « miracle ». Voir également la vidéo sur le site du Républicain Lorrain.
En France, le mésusage de l’Ozempic reste limité mais est en augmentation constante : en mai 2022, 0,7 % des personnes s’étant fait rembourser le médicament l’ont utilisé de manière détournée, contre le double un an plus tard, a estimé en début de semaine l’ANSM (l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé). Un mésusage qui coûte cher à l’Assurance maladie, quand on sait qu’une seringue contenant quatre doses coûte plus de 70 euros.
Des pénuries à l’étranger
Surtout, cette pratique « se fait au détriment des personnes diabétiques (type 2) qui peuvent avoir des difficultés d’accès à leur traitement », alerte l’ANSM. « Le sémaglutide est [l’antidiabétique, NDLR] le plus puissant de la classe la plus puissante (hormis l’insuline). Et il n’y a parfois pas de possibilité de remplacement, quand le traitement est déjà à son maximum », explique le Pr Jean-Daniel Lalau, chef du service d’endocrinologie-diabétologie-nutrition au CHU d’Amiens, sur le site The Conversation.
Australie, Royaume-Uni, États-Unis… Dans certains pays, des pénuries d’Ozempic se font déjà ressentir. Si ce n’est « pas encore le cas en France », selon Catherine Simonin, administratrice de France Assos Santé, qui regroupe environ 90 associations de patients, le problème commence à se poser à l’échelle européenne. Pour que des diabétiques ne soient pas privés d’un traitement dont ils ont besoin, l’ANSM et l’Assurance maladie ont mis en place « une surveillance active de l’utilisation » du produit. Elles appellent les pharmaciens à la vigilance et les médecins à ne pas prescrire d’Ozempic hors AMM (autorisation de mise sur le marché). Selon Le Parisien, plusieurs enquêtes ont été ouvertes après la découverte d’ordonnances falsifiées.
Un « plan d’actions » à la rentrée
Catherine Simonin estime qu’il est « très dangereux » de se procurer de l’Ozempic sur internet car il peut s’agir « d’un faux médicament ». Et de rappeler qu’il « ne faut le prendre que sur prescription médicale », en respectant les indications, sachant que cet antidiabétique a « un service médical rendu modéré » et peut entraîner des effets indésirables. Parmi les plus fréquents on retrouve « les maux de tête, les vomissements » et parmi les plus graves « les pancréatites aiguës », liste-t-elle. Ce mois-ci, l’Agence européenne des médicaments a par ailleurs annoncé qu’elle examinait les éventuels effets indésirables du médicament, après des signalements d’idées suicidaires et d’automutilation.
Quant à l’ANSM et l’Assurance maladie, elles réuniront « en septembre » associations de patients et professionnels pour « définir un plan d’actions » visant à décourager les détournements de l’Ozempic. En attendant, Catherine Simonin insiste sur le fait que ce médicament n’est pas un produit « miracle ». Et que la meilleure manière de perdre des kilos reste encore « d’agir en amont, avec une nutrition saine et de l’activité physique ».
Par Léa Guyot